Entrée n°10

Tomoya Obokata, rapporteur spécial sur les formes contemporaines d'esclavage au Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, dit craindre que la pression économique sur les entreprises n'encourage les états libéraux à démanteler un peu plus le droit du travail et les mécanismes de protection sociale. De telles décisions pousseraient selon lui un nombre de personnes toujours plus grand vers la servitude et le travail forcé, alors que l'ampleur du chômage actuel semble déjà liée à la précarité des formes de travail contemporaines. Un choix politique qui n'est pas une fatalité, comme le rappelle l'Organisation Internationale du Travail (OIT), qui relève que « (c)ertains pays ont cherché des moyens innovants pour accroître l’espace budgétaire et permettre ainsi l’extension de la protection sociale comme, par exemple, des taxes sur les profits réalisés sur les ventes des entreprises de haute technologie, l’imposition unitaire des sociétés multinationales, des taxes sur les transactions financières ou sur les billets d’avion. » L'organisation rappelle que 55% de la population mondiale, soit plus de 4 milliards de personnes, n'ont accès à aucune couverture sociale.

L'historienne Mar Hicks s'est penchée sur l'effondrement de l'infrastructure technique de l'assurance chômage dans plusieurs états des États-Unis, dans un article paru dans Logic Mag et commenté par Hubert Guillaud. Mar Hicks pointe le manque d'entretien d'un code informatique ancien bien que solide et met en cause les politiques d'austérité successives qui ont réduit le personnel nécessaire au maintien d'un service de qualité. Selon l'historienne, ce qui pourrait passer pour une panne technique est en fait une faute politique, d'autant plus grave qu'elle touche systématiquement les plus vulnérables, avec des conséquences désastreuses lors d'événements catastrophiques comme lors de l'ouragan Katrina ou de la pandémie de Covid.

Jeff Huang, traduit par le projet Framalang, donne 7 conseils pour faire durer les pages web dans un « manifeste pour un site web durable » publié sur son blog. Multiplication de solutions techniques concurrentes de plus en plus sophistiquées, dépendance à des technologies abandonnées et à des plateformes fermées... Face à ces pratiques qui menacent la durabilité des ressources web, l'enseignant en informatique suggère notamment de se tourner vers des technologies simples et robustes, comme le HTML et le CSS, et de limiter la dépendance des pages web aux contenus d'autres sites (hotlinking). Les mêmes constats appellent des réponses similaires pour David Legrand dans Nextinpact. D'après le journaliste, la dépendance aux services des plateformes centralisées va à l'encontre d'une appropriation du numérique par tous et d'une démocratisation de la pratique de publication. « Comme si, finalement, » explique t-il, « le Minitel avait gagné en douce (loin de ses concepteurs français) face à l'approche ouverte et décentralisée qui était celle qui a porté la victoire d'Internet à ses débuts. »

Echos de la mondialisation

« On ne dit pas que les effets de seuil n’existent pas. (...) Mais dans la plupart des écosystèmes, ce qu’on observe, c’est une détérioration progressive du milieu, avec son lot de conséquences dès l’apparition des premières perturbations : disparition de certaines espèces, ou de certaines fonctionnalités de l’écosystème. » José M. Montoya, écologue

« Nous adoptons des concepts techniques tels que le contrôle décentralisé, la responsabilisation des utilisateurs et le partage des ressources, car ces concepts sont en résonance avec les valeurs fondamentales de la communauté de l'IETF. Ces concepts ont peu à voir avec la technologie qui est possible, et beaucoup à voir avec la technologie que nous choisissons de créer. » Stéphane Bortzmeyer, citant la charte de l'Internet Engineering Task Force (IETF)